Taedium Vitae

Taedium Vitae

lundi 27 avril 2015

À l'école de l'aphorisme

Nous nous félicitons trop peu de tout ce que nous avons refusé et délaissé dans nos vies que nous arrivons à croire naïvement que la réussite est nécessairement un bien.




«Ce qui importe n'est pas ce que nous apportons, mais ce que nous mettons à mort

Karl Kraus dans Aphorismes : Dires et contre-dires

vendredi 24 avril 2015

Révéler les imbéciles par le silence



«Le philosophe Emerson, pour sa part, répondit à des contemporains goguenards qui l'interrogeaient sur ce que les livres de philosophie avaient bien pu lui enseigner : '' - Ils m'ont avant tout appris à me taire en présence de gens de votre sorte.''»

Denis Grozdanovitch dans L'art difficile de ne presque rien faire

mercredi 22 avril 2015

Pensées pour nous-même




«Songer en t'arrêtant à chacun des objets qui tombent sous tes sens, qu'il se dissout déjà, qu'il se transforme et qu'il est comme atteint par la putréfaction et par la dispersion; ou bien, envisager que tout est né pour mourir.»

Marc-Aurèle dans Pensées pour moi-même

dimanche 19 avril 2015

Le mammouth laineux



«L'homme est un singe hurleur pour l'homme. Il se jacasse tant d'amertume dans la jungle de nos insignifiances, et nous sommes si heureux de ce bruit.»

Serge Bouchard dans De nouveaux lieux communs

mardi 14 avril 2015

À coups de marteau




«C'est par pur préjugé moral que nous accordons plus de valeur à la vérité qu'à l'apparence; c'est même l'hypothèse la plus mal fondée qui soit. Reconnaissons-le : nulle vie ne peut subsister qu'à la faveur d'estimation et d'apparence inhérentes à sa perspective.; et si l'on voulait, avec un certain nombre de philosophes, à grand renfort d'exaltation vertueuse et de niaiserie, supprimer complètement le ''monde apparent'' , si vous étiez capable d'une telle opération, il ne resterait rien non plus de votre ''vérité''. Car enfin, qu'est-ce qui nous force à admettre qu'il existe une antinomie radicale entre le ''vrai'' et le ''faux''? Ne suffit-il pas de distinguer des degrés dans l'apparence, en quelque sorte des couleurs et des ''valeurs'' diverses, pour employer le langage des peintres? Pourquoi le monde qui nous concerne ne serait-il pas une fiction? Et si l'on objecte qu'à toute fiction il faut un auteur, ne doit-on pas carrément répondre : pourquoi? Cet ''il faut'' n'appartient-il pas lui aussi à la fiction, peut-être? Est-il donc interdit d'user de quelque ironie à l'égard du sujet, de l'attribut et de l'objet? Le philosophe n'aurait-il pas le droit de s'élever au-dessus de la foi qui régit la grammaire? Tous nos respects aux gouvernantes; mais ne serait-il pas temps pour la philosophie d'abjurer la foi des gouvernantes?»

Nietzsche dans Par-delà bien et mal

vendredi 10 avril 2015

Car nous sommes désormais dans la Culture-monde

 

«C'est ainsi que le monde de la culture-monde tend à devenir indéchiffrable, confus, chaotique : l'homme de la culture-monde n'a plus d'autorités supérieures, plus de lunettes, plus de boussole pour le guider. Jusqu'alors la culture était ce qui fournissait des cadres symboliques permanents à la vie des hommes, ce qui donnait sens à l'expérience du monde, de la vie et de la société. Il n'en va plus ainsi : à bien des égards, c'est l'inverse qui est à l'œuvre. La culture-monde apparaît comme ce qui dépossède les individus des clés d'intelligibilité de leur univers. Elle n'éclaire plus ce qui est et ce qui vient, elle ne fixe plus de cap : elle déstructure ce qui naguère encadrait la pensée de la vie. La culture construisait un monde familier et commun ; l'hyperculture nous le rend étranger à nous-même au moment où les distances se rapprochent, où l'information prolifère, où tout est à portée de clic. Plus l'individu est rendu responsable de lui-même, plus il est désorienté, privé des moyens permettant de vivre dans un monde compréhensible.»

Gilles Lipovetsky dans L'Occident mondialisé : Controverse sur la culture planétaire

mercredi 8 avril 2015


«La vulgarité, c'est ne connaître ni le doute ni la honte.»

Dominique Noguez dans Soudaine mélancolie

dimanche 5 avril 2015

Viser l'intemporel semble rendre sympathique


Marcel Conche semble être le philosophe parfait; parfait pouvant avoir comme synonyme ici d'être incomparablement intègre. Intègre avec lui-même, les autres, le monde, Dieu. Sourcils fronçant mais ayant la gueule d'un homme singulièrement sympathique, ce spécialiste de Pyrrhon, qui vient tout juste d'avoir 93 ans, ne demande à rien ni personne si ce n'est que de l'accepter comme philosophe sans système, qui cherche encore. Mais chercher quoi? Drôle de question... puisqu'il n'y a jamais rien eu à chercher, ce qui n'empêche pas l'entreprise et, au contraire, la justifie. Marcel Conche est un grec dans l'âme et vise l'intemporel, ce qui le sauve aussi de toutes les philosophies d'époques, ces pensées qui ne sont bonnes que pour une étroite tranche d'histoire et qu'on délaisse une fois consumés.

«Les philosophies qui se sont mises tellement à la merci du temps historique ne sont plus, au bout de quelques lustres, que des objets d'histoire. Sartre, Hegel, expressions et organes de leur époque, ont construit dans l'éphémère - cette époque elle-même. Le temps conteste toute chose. Tout perd de son importance. La réfutations même devient inutile

Marcel Conche dans Philosopher à l'infini 

mercredi 1 avril 2015

Al-Maari



Un poète syrien, aveugle, contemplant la vie plus que les yeux ne peuvent, a un jour devancé Shakespeare de quelques siècles :

«Engendrant et détruisant, le temps est un enfant
Qui joue et qui se divertit avec une motte de terre
»

Abul Ala al-Maari dans Chants de la nuit extrême